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samedi 11 juin 2022

A un cheveu


Autrice
 : Maëlle Desard.

Edition : Slalom.

Parution : 2022.

Genre : Contemporain jeunesse.

Nombre de pages : 313.

Radar à diversité : personnage principale atteinte d'alopecie.

Avertissement de contenu : Sexisme, maladie, harcèlement sexuel, harcèlement scolaire.

Synopsis : Un grand bain d'humour et d'empowerment

À 17 ans, Emma aime la natation, son frère presque jumeau, le chocolat et dessiner dans les marges de ses cahiers. Elle serait à un cheveu de la belle vie si elle n'avait pas perdu les siens, de cheveux, deux ans plus tôt (tandis que le reste de ses poils a continué à pousser, merci bien !). Affublée d'une d'une perruque avec laquelle elle entretient une relation d'amour-haine quasi mystique, Emma décide de profiter du déménagement de sa famille pour repartir de zéro. Nouvelle vie, nouveaux amis... et peut-être un premier amour !

Un roman lumineux sur l'acceptation de soi et de son corps, résolument féministe et universel !

Avis : A un cheveu est un titre qui m’intriguait en raison de son sujet. En effet, je savais peu de choses sur l’alopecie (une maladie qui a pour grande conséquence la perte de cheveux), notamment chez les femmes. L’autrice étant concernée, j’étais doublement curieuse de découvrir ce roman. J’ai passé un bon moment de lecture et je le conseille si vous êtes curieux de le découvrir à votre tour. Je remercie les éditions Slalom pour l'envoi de cette lecture !

On suit donc le parcours d’Emma, une jeune fille atteinte d’alopecie qui a été harcelée dans son ancienne école à cause de sa maladie et qui a dû déménager avec sa famille à Strasbourg. Elle atterrit dans un nouvel établissement dans une ville qu’elle ne connaît pas avec l’espoir d’être mieux intégrée. Fort heureusement, elle peut s’appuyer sur deux atouts : son frère, Christophe, et sa perruque. Tout d’abord, ce roman s’avère réellement intéressant parce qu’il traite d’un sujet trop peu traité encore, d’une maladie méconnue et de ce que cela implique dans la vie d’une femme (où la féminité est très normée et que les cheveux font partie des critères importants de la féminité). J’ai également apprécié la narration qui se place du point de vue de l’héroïne avec une touche humoristique qui fait parfois sourire. Le ton est souvent sarcastique et cela rend le récit très fluide et agréable à lire. C’est un roman qui se dévore facilement grâce au style d’écriture de l’autrice.

Certains éléments peuvent paraître irréalistes (je pense à l’épisode où Emma manque de se noyer et que lorsqu’elle sort de l’eau, elle ne songe même pas à respirer … alors que c’est instinctif), mais ça ne m’a pas gêné dans ma lecture. 

Si j’ai beaucoup apprécié la relation fraternelle entre Emma et son frère (et par extansion l’importance du grand frère dans le récit et dans la vie de l’héroïne), j’ai été moins convaincue par ses autres relations. Le livre est marketté comme « féministe », sûrement à cause des thématiques abordées (la maladie et la perte de cheveux chez une femme, les attentes sur le physique des femmes, les dick pick, le harcèlement sexuel, le sexisme, …), mais j’ai été déçue des personnages féminins. Emma, en premier lieu, fait une remarque sexiste sur les autres filles dès le début du roman, comme quoi les filles de son âge ne voient pas d’intérêt dans le sport hormis « pour se faire un joli cul ». Ce que je trouve condescendant, sexiste et réducteur. Ce n’est pas non plus réaliste étant donné qu’elle a sûrement fréquenté d’autres filles nageuses et d’autres filles sportives (mais son passé de nageuse n’est que rarement évoqué hormis pour parler de sa passion). J’aurais préféré suivre une héroïne dans une autre dynamique : qu’au contraire, elle veut démonter les clichés et s’agace des gens qui pensent que les filles de son âge font du sport seulement pour avoir un beau corps.

Si je suis en accord avec la plupart des messages du roman, je n’ai pas été convaincue parfois de leur exécution. En effet, j’ai été surprise de voir qu’Emma a des réflexions trop matures pour son âge (sur l’envoi des dickpick par exemple). Elle utilise le terme d’agression alors qu’à son âge, on n’a pas forcément ce niveau de déconstruction. Certes, les jeunes ont de plus en plus conscience de certaines choses, mais dans ce cas-là, ce n’est pas cohérent avec la remarque qu’elle a faite au début du récit et que j’ai évoqué un peu plus tôt. Il y avait un décalage trop important selon moi entre ces deux réflexions. J’ai plus eu le sentiment que c’était l’autrice qui parlait et non Emma. Celle-ci trouve ses mots facilement face à sa mère, une femme plus âgée, en sachant exactement quoi lui répondre, j’ai trouvé que ça manquait de naturel.  

Tout ceci m’amène à parler du personnage de la mère d’Emma. J’aurais également préféré qu’elle soit différente, une mère plus solidaire et bienveillante, et non une mère qui répond aux même mécanismes du patriarcat en ayant des réflexions sexistes. Les deux mères présentes dans le récit réagissent mal face aux propos de leurs filles quand leurs maris réagissent bien. C’est sûrement réaliste d’un certain point de vue, mais j’aurais aimé qu’au moins l’une d’entre elles ait le bon comportement. Au lieu de ça, on a l’impression que ce sont les pères les meilleurs et qu’on ne peut pas compter sur le soutien des mères.  

En plus de l’héroïne, des mères du roman et de la grand-mère (décédée et qui avait une passion pour le ménage, c'est tout ce qu'on sait), on a aussi droit à la nouvelle meilleure amie punk mais classe, la grande rivale et l’ancienne meilleure amie superficielle. Si le personnage de Charlotte permet d’aborder les amitiés toxiques (ce qui est une excellente chose), j’ai regretté son manque de nuances et de son côté stéréotypé de fille superficielle. On ne voyait que ses mauvais côtés sans nuancer sa personnalité. Pour avoir connu des amitiés toxiques, il y avait toujours des raisons qui faisaient qu’on reste attaché aux personnes concernées même si celles-ci nous font du mal. Dans le cas d’Emma, c’est justifié, mais on ne le comprend pas réellement.

Toutefois, malgré les points que j’ai relevé, il y a de nombreux aspects du roman que j’ai grandement apprécié. On parle des règles, de la pilosité féminine, de regarder des pornos en tant qu’adolescente, le récit normalise le consentement avant d’embrasser ou d’approcher quelqu’un … Ce sont des aspects que j’ai adoré retrouver dans le récit et qui rendent l’histoire d’Emma plus authentique et vraie, en plus de délivrer des messages importants aux lecteurs et lectrices. 


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